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Un petit monde de grandes lettres.
17 novembre 2012

Kafka, ou l'homme derrière la machine à écrire.

kafka

 

Cela faisait maintenant un certain temps que le cinéma n'avait pas pointé le bout de sa caméra au sein de ce blog, il convenait donc d'y remédier!

L'apparition du nombre de films entièrement disponibles au sein de Youtube allant toujours croissante, il devient très simple de regarder dès que l'on a envie au gré d'une recherche aléatoire un joyau du septième art. C'est dans ce contexte que j'ai pu découvrir Kafka, une réalisation du célèbre Steven Soderbergh datant de 1991. Soderbergh s'est illustré dans le milieu du cinéma par des films tels que Ocean's Twelve ou Che. Après le succès de Sexe, mensonge et trahison, Kafka est le deuxième film de Soderbergh mais celui-ci s'avèrera peu reconnu par la critique et considéré comme un réel échec commercial. Cette constatation est assez troublante dans la mesure où le film possède de sérieuses qualités esthétiques et propose au spectateur une folle escapade dans le monde romanesque d'un Kafka magnifiquement interprété par Jeremy Irons (acteur dont je suis particulièrement amateur et que le rôle plus récent de pape Alexandre VI dans la série Les Borgias dévoile aux yeux du public!).

Lorsque j'ai débuté le visionnage du film, n'ayant aucune information quant à son genre, je m'attendais à un biopic sur Franz Kafka et il est vrai que les premiers instants du film peuvent le laisser supposer. Si la première scène présente un homme se faisant assassiner par une espèce de monstre, le spectateur peut alors penser que ceci fait référence à une idée de Kafka. Ensuite le réalisateur nous propose de partager la vie banale du célèbre auteur pragois. Kafka (1883-1924) écrivain à l'origine de sublimes romans tels que Le Procès ou de nouvelles comme La Métamorphose est notamment connu pour avoir travaillé toute sa vie dans une compagnie d'assurance tel un "gratte papier". Employé de bureau le jour, romancier la nuit tel fut la vie de Kafka et c'est sur cette ambivalence que le film va jouer. Ainsi tout se déclenche lorsque Kafka s'inquiète de la disparition de son ami Eduard Raban, le spectateur comprend très vite qu'il s'agit alors de l'homme assassiné à la première scène... Kafka en parallèle de son emploi de bureau se trouve alors en contact avec des amis révolutionnaires de Raban et notamment de l'amante de celui-ci qui est elle-même assassinée, la vie de Kafka est alors directement menacée par les dirigeants du "Château" en référence directe à l'oeuvre de l'écrivain, édifice surplombant la ville de façon inquiétante, ce dernier doit alors agir. Avec l'aide du fossoyeur, Kafka parvient à s'introduire dans le bâtiment et découvre les sombres expériences qui y sont menées...

Le scénario est complexe et assez prenant, en faire un résumé tel que je le propose ne rend que difficilement le plaisir autant intellectuel que visuel que procure ce film. Les ressorts cinématographiques sont nombreux, le noir et blanc qui englobe une large partie du film considérée comme "quête de la vérité" de Kafka laisse place à la couleur intérieure du château qui créé un contraste saisissant. Si la performance d'acteur de Jeremy Irons est très séduisante par sa grâce, ses mimiques et expressions, il est entouré de personnages tous plus intrigants les uns que les autres, à l'image de Burgel petit homme obnubilé par l'ordre qu'il est chargé de faire régner dans les bureaux, le patron de la compagnie d'assurance vieil homme calme mais insaisissable, les deux assistants jumeaux loufoques dont les bouffonneries sont un vrai régal pour le spectateur... Ici le réalisateur mélange suptilement humour et inquiétude, inquiétude qui se dévoile intégralement de façon étonnante par le passage en couleur des scènes dans le château. Il serait difficile d'en dire plus sans en dire trop, mais j'ai particulièrement apprécié le duel entre Kafka et le garde du château sur la lentille géante d'un microscope grossissant tour à tour un cerveau humain puis l'oeil du scientifique à la tête de l'organisation secrète, une véritable scène d'anthologie (à 1h21 dans le film).

Interrogeant tour à tour sur l'absurdité humaine, les étrangetés inhérentes aux relations sociales, la folie cachée et plus foncièrement sur l'écrasement de l'individu par la société l'adaptation à l'écran de Soderbergh met particulièrement bien en relief les motifs kafkaïens. Si l'on peut trouver malgré tout quelques longueurs au cours du film, il convient alors de les concevoir comme autant de pauses que le réalisateur souhaite donner au spectateur qui peut alors se concentrer sur la beauté des tableaux représentés, tel qu'un Kafka marchant dans la fraîcheur du matin sur un pont (1h24). L'ambiance globale de l'oeuvre apparaît comme très feutrée et intimiste ce qui ajoute une qualité certaine et vient accentuer la beauté de ce Kafka vu par Soderbergh. En conclusion, une question peut se poser derrière cette quête kafkaïenne, si le dépassement de la réalité était l'apanage du mystère ne convient-il pas tout simplement de détruire ce mystère afin que la réalité reprenne ses droits? Tout simplement? Vraiment?

 

"Kafka, on m'a dit que vous voudriez être écrivain?

-Bien modestement

-Vous devriez trouver un passe-temps plus athlétique, cela donnerait un peu de couleur à ce visage bien pâle!"

 


Kafka par Steven Soderbergh visible sur youtube en vostfr en cliquant sur ce lien

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